Le journalisme n'a jamais été aussi dangereux, a averti aujourd'hui Cilla Benkö, vice-présidente de l'UER et directrice générale de la radio suédoise, lors d'un événement spécial en Ukraine à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

S'exprimant lors de l'événement « Le Front de la vérité – Reportage en temps de guerre », organisé par l'ambassade de Suède à Kiev, Cilla a tiré la sonnette d'alarme face à l'escalade des menaces qui pèsent sur les journalistes dans le monde entier, à la pression politique croissante exercée sur les médias de service public et à la propagation des pratiques autoritaires.

« Chaque journaliste tué est non seulement une profonde tragédie pour ses proches, mais aussi un coup porté à la démocratie elle-même », a-t-elle déclaré. « Lorsque les journalistes sont réduits au silence, le monde devient plus petit, plus étroit et plus vulnérable à la propagande. »

145 journalistes et professionnels des médias ont été tués en 2024*1 et plus de 550 sont toujours emprisonnés dans le monde*2. « Ces statistiques sombres doivent nous alerter », a-t-elle souligné. « La répression des médias libres est souvent le premier pas vers une répression plus large. »

Lors de son discours, Cilla a souligné les menaces mondiales qui pèsent sur la liberté des médias, s'inquiétant particulièrement des pressions politiques croissantes exercées sur les radiodiffuseurs publics – une tendance qui, selon elle, s'accélère avec la montée des politiciens autoritaires.

« En temps de guerre, des médias fiables sont plus importants que jamais » Cilla a souligné le rôle de Suspilne, le radiodiffuseur public ukrainien, dans la diffusion d'informations fiables face à l'agression russe persistante. « Avec des médias fiables et à large audience, vous avez le meilleur adversaire contre la propagande et la désinformation. » Mykola Chernotytskyi, président du conseil d'administration de Suspilne Ukraine et membre du conseil exécutif de l'UER, s'est également adressé à l'assemblée, soulignant le travail essentiel accompli par le radiodiffuseur ces dernières années. Il a déclaré : « Cette invasion à grande échelle a confirmé une chose simple : lorsque les gens ont besoin d'informations fiables, ils se tournent vers les médias de service public… Suspilne crée un espace d'information sûr et indépendant. Pas de panique ; juste des faits, du contexte et des reportages clairs. » « C'est le genre de journalisme dont un pays en guerre a besoin. »

Le journalisme vérifié et sans publicité de Suspilne attire désormais plus de 13,4 millions d'abonnés sur les réseaux sociaux (contre 2,4 millions au moment de l'invasion) et, ce mois-ci, sa chaîne YouTube Novyny a atteint le million d'abonnés. Ses reporters ne se contentent pas de couvrir les lignes de front : ils documentent les crimes de guerre présumés et contextualisent les événements. L'année dernière, Suspilne a également partagé près de 1 700 vidéos avec les diffuseurs européens via le News Exchange de l'UER, jouant un rôle essentiel pour faire connaître l'histoire de l'Ukraine au monde entier.

La visite de Cilla Benkö à Kiev marque sa deuxième visite en Ukraine depuis l'invasion à grande échelle, soulignant le soutien constant de la Suède aux médias et à la démocratie ukrainiens. La Radio suédoise et Suspilne collaborent étroitement depuis 2017 pour renforcer le journalisme de service public dans des conditions difficiles.

Cilla, dont la Radio suédoise célèbre son 100e anniversaire cette année, a conclu son discours par un rappel brutal : « Y aura-t-il encore une presse libre dans 100 ans ? Je ne sais pas. » Mais cela vaut la peine de se battre, et la bataille est en cours. »

*1 Rapport annuel de l'International News Safety Institute sur les victimes des médias

*2 Rapport de Reporters sans frontières 2024